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Irina Volkonskii
 


Irina Volkonskii
Flamme slave

By Denyse Beaulieu / Pictures : Vincent Lappartient

Russe. Rousse – « Les vrais anges ont des cheveux orange», bombé en une nuit sur les murs de Paris, c’est elle. Russe, rousse, forcément excessive, avec son nom d’héroïne de Dostoïevski, sa ville natale de Grozny à feu et à sang. « Fire walks with me », l’énigmatique message de la Laura Palmer rêvée par David Lynch, pourrait figurer sur le blason d’Irina Volkonskii. Le feu des cristaux Swarovski qu’elle sème sur des objets détournés pour en faire des bijoux d’une poésie enfantine : « J’étais tellement stressée que j’ai mis du strass partout. » Irina dit « je n’ai jamais été un enfant » -- c’est ce que disent ceux qui n’ont jamais cessé de l’être profondément. Irina ne cesse de nous narrer des contes, chacun de ses bijoux naît d’un conte, elle brûle de les faire connaître, mais comment prendre à part chacun des clients de ses 300 points de vente pour leur souffler, dans son français adorablement chahuté, la façon dont elle a choisi les pièces ? « Chez Irina, on ne choisit pas », avait-elle décrété lorsqu’elle vendait elle-même ses pièces dans sa boutique de la rue Cassette : elle expulsait d’autorité les hommes venus chercher un cadeau pour ressortir avec une pochette-surprise. « Je ne fais que des pièces pour embobiner les hommes », précise la ravageuse, qui conserve encore les mots notés par ces hommes pour décrire les femmes auxquelles ils destinaient les bijoux… « C’était tellement beau que j’étais amoureuse de tous ces hommes. »

Un conte, le premier. La France vient d’être dévastée par la tempête de 1999. Irina traverse les jardins du Luxembourg. Elle et ses amis ramassent les brindilles. Pavées de strass, montées sur broches : « Pour les filles branchées ou pour brancher les filles ». C’est sa première création. Les bracelets-menotte strassés ? Parce qu’elle a entendu un jour, dans un café, un père dire à sa fille « Passe-moi tes petites menottes. » Les oreillettes de téléphone portable à porter en boucles d’oreilles ? Réaction outrée aux goujats d’un dîner, parlant sur leur « mob » plutôt qu’entre eux. Irina recrute une équipe de 60 voleuses d’oreillettes dans divers vestiaires parisiens, elles piquent les objets offensants et captent leurs propriétaires sur Pola. Cela donne la collection « Les filles, ne sortez pas avec les téléphonistes. » Un sifflet strassé ? Parce que « ça me coupe le sifflet ». « Pour une fille qui a du chien » : un toutou mécanique entièrement pavé de strass, à sortir en laisse dans les soirées. Une chaise Starck en plexi pavée de miroirs ? « Pour les hommes aux yeux qui brillent, pour voir sous les jupes des filles. »
Le choc des mots, chaque fois. Irina la polyglotte – elle parle même l’espéranto – prend le français au pied de la lettre pour transformer des objets quotidiens en parures. Une démarche plus proche de celle d’une artiste conceptuelle que d’une simple designer de babioles colorées. Un don de petite fille enchanteresse qui adore savourer des mots acidulés et désuets comme « gourgandine » ou « saperlipopette ». Irina Volkonskii ne cesse de déverser sur le monde, avec une générosité extravagante, les histoires qui naissent sous sa crinière enflammée comme des déclarations d’amour.


Denyse Beaulieu