Avec un quart d’heure d’avance, je pourrais me payer le luxe de flâner dans Tranoï mais un pressentiment me pousse à traverser ce salon d’une seule traite. J’avais vu juste. Déjà nombreux, entassés au pied de l’escalier qui mène au salon d’honneur du Palais Brongniart, les journalistes attendent l’aval des attachés de presse, magique sésame sans lequel l’accès au show reste impossible.
Au compte-gouttes, nous passons afin d’assister à une singulière présentation artistique et quelle présentation ! Bernhard Willhelm dans toute sa splendeur.
Une complexe installation envahit tout le lieu, ne laissant autour qu’un étroit passage à emprunter pour découvrir la performance puisque les mannequins restent en place. Le ton est donné, nous allons donc déambuler et contourner l’œuvre.
Sur les bits assaillants des djs duellistes, théière en main et crêtes aiguisées, de pleureuses punkettes renversent sur le sol, au travers d’ingénieux ready-made, de la peinture verte, jaune et orangée tandis qu’une autre pédale dans le vide.
Coiffées de reptiles, sans craindre de tacher leur tweed scarifié, certaines empalent des fruits. On célèbre la vie, la nature émerge sur un tapis de mousse, et les plantes poussent dans d’étranges poids qu’un curieux haltérophile tout de stretch vêtu peine à soulever. Avec fierté, sur sa robe kimono décalée, la pythie exhibe une braguette proéminente au troupeau de photographes qui la mitraillent allègrement.
La roue tourne et nous avec.
Par terre, une femme aux cils papillons chevauche son homme et le fouette dans un simulacre de cris orgasmiques. Madame prend le pouvoir, celui du sexe et fait jaillir sa féminité au rythme des coups de couteau d’une geisha désœuvrée.
Au loin, à l’abri de ce tumulte, sous un palanquin d’organza, baskets aux pieds, la reine se repose.
Benoit Foucher
Photos Julien Mignot
Presse Kuki de Salvertes – Sébastien de Brito / Totem