A force de croire que marcher est toujours mieux que les transports en commun, j’arrive au show Rad Hourani avec le cheveux frisé, témoin de ma ballade sous une pluie inattendue à destination de la rue du faubourg St honoré.
Qu’importe que le brushing ne soit plus, je suis la charmante hôtesse jusqu’à mon siège en essayant de ne pas me prendre les pieds dans le tapis, trop occupée à regarder les plafonds et les moulures sublimes de l’endroit.
A ma gauche, une dame s’énerve en « franglais » au telephone « listen darling, you can not do this ! Tu ne peux pas !« . A droite, ma voisine semble rechercher activement son futur appartement à l’aide de son smart phone…
Petit regard furtif dans l’immense miroir devant moi : quelqu’un aurait-il un peigne?!
L’arrivée du premier mannequin suffit cependant à me faire oublier ce fiasco capillaire qu’est le mien. Structuré à souhait, noir, imposant, sobre mais chic : ce ne sont pas les adjectifs qui manquent pour qualifier ce néo tailleur à l’allure follement contemporaine.
La collection Rad Hourani étant unisexe, les mannequins hommes et femmes se succèdent et pour les tenues de chacun une constante : du noir et du structuré. Étant une fille à chaussures, mon regard est immédiatement capté par celles qui me passent sous les yeux : talon rectangle d’un bon douze centimètre, zip sur l’avant pied, hauteur bottine et bout ouvert : les mêmes en 40 s’il vous plait !
Anticonformiste dans l’âme, la collection de Rad Hourani est radicale: il est d’ailleurs le premier créateur unisexe dans la haute couture. Ses vêtements, réalisés selon les principes de l’architecture sont structurés au millimètre.
Rad n’est « ni couturier, ni photographe, ni réalisateur, ni artiste. Il est tout à la fois ». Un visionnaire qui s’est donné pour mission de s’émanciper des règles traditionnelles pour imposer ses propres règles. Dire de lui « qu’il prône la modernité pour une odyssée sans règles » c’est ne pas le comprendre.
Intemporelle, sa collection l’est aussi et est une réponse à son désir de ne pas dater un vêtement. Alors au final qu’est-ce qu’on en retient? Tout d’abord un joli choix de matière: une omniprésence de la crêpe de soie accompagnée parfois de détails en cuir et d’une finition luxueuse : toutes les doublures sont en satin duchesse de soie.
On appréciera également les jeux de zips ainsi que les trompe l’oeil, les découpes d’un sexy discret sur les épaules, les ouvertures sur le dos, les néo-noeuds de petites filles futuristes revisités ici en ceinture de taille ainsi que l’équilibre des volumes.
Regretterions-nous une touche de couleur? Même pas. Rad Hourani défie amplement la supposée morosité du monochrome noir.
Le final réussit à nous scotcher (et à déscotcher ma voisine de son écran de téléphone. Non mais!) : Un à un les mannequins sortent le visage masqué de différentes couleurs: Serait-ce là un message pour confirmer que l’on s’affranchit du sexe et que la notion de genre n’est plus? On s’en tiendra à cette hypothèse.
Cynthia Jreige
Photos Sylvain Lewis
Presse Erick / Rad Hourani