Portrait
Lorsque Rachel Laurent, havane coincé entre ses
longs ongles laqués de rouge, promène dans les vernissages
sa dégaine lookée punk-Yohji de « femme chic défroquée
», comme elle dit, les hommes s’émeuvent… Quand
ils voient son travail, il arrive qu’ils se décomposent.
Festins cannibales exquisément composés où des fragments
de petits baigneurs nagent dans le ketchup, poupées gonflables
disposées dans des ordures ou déguisées en SDF handicapées
– stylisme Guerrisold, panneau « J’AI FAIM » authentique
racheté à une mendiante yougoslave devant le Bon Marché…
« Je ne fais que dans la profanation », tranche Rachel Laurent,
en désignant une série d’« autoportraits défoncés
» : photos grimées comme si elle avait été
victime d’un accident de scalpel, projetées sur du papier
froissé puis re-photographiées. « Ca choque beaucoup.
Moi, je me trouve ravissante… Cela dit, je n’aurais jamais
songé à me photographier si je n’avais pas posé
déguisée en Claude Cahun pour Olivier Blanckart . Je me
suis vue très laide, et ça m’a débarrassée
de l’image de la femme idéale que nous trimballons tous avec
nous. Ca a été très libérateur. J’ai
perdu mon narcissisme idéal. » |
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Le même geste libérateur avait jadis conduit Rachel Laurent
à couper ses boucles Rita Hayworth et à passer au noir
pour des raisons strictement pratiques : elle s’était achetée
une moto à gros cylindre. « De toutes façons, quand
je me mettais en femme femme, j’avais un peu l’air d’un
travelo », décrète-t-elle. Rachel Laurent est à la Galerie Loevenbruck, 40 rue de Seine,
2 rue de l'Echaudé - 75006 PARIS NB. L’artiste Olivier Blanckart a réalisé une série de portraits, de lui-même ou de ses proches, déguisés en personnages de l’histoire de l’art. Il a grimé Rachel Laurent en Claude Cahun, artiste surréaliste et lesbienne dont les autoportraits jouaient sur la ligne de l’identité sexuelle. |