De la Route
de la Soie aux abords de l’avenue Montaigne, du réalisme soviétique
à la peinture classique, de la révolution culturelle à
la réappropriation gourmande, amoureuse, inexorable, d’un patrimoine
de l’humanité dont sa nation géante a été
sevrée pendant de longues années…
« Chez nous, il n’y avait pas d’œuvres occidentales
», raconte Yin Xin. « Seulement de mauvaises photos en noir
et blanc. Lorsque j’ai vu pour la première fois un tableau
de Georges de La Tour, j’ai éprouvé le même choc
que devant une femme dont tu es amoureux depuis longtemps sans qu’elle
te connaisse. Enfin elle est en face de toi. » Yin Xin n’a eu,
depuis, de cesse que de la séduire… Et elle est là,
dans son salon : « La Nativité », version chinoise.
Lorsqu’on lui demande si cette réappropriation de la tradition occidentale ne correspond pas à l’appétit formidable d’une Chine désormais prête à dévorer le monde, Yin Xin proteste : « Mais beaucoup d’artistes ont peint « d’après » ! J’ai d’abord fait des copies pour apprendre la technique, ensuite j’y ai trouvé mon style. »
Dorénavant, c’est
sur la matière même des tableaux anciens que Yin Xin exerce
ce style : toiles chinées dans les brocantes, restaurées,
métamorphosées en palimpsestes, où les pagodes remplacent
les clochers et les robes de brocart, les buscs et les redingotes. Une série
de fausses-vraies antiquités – à l’envers exact,
par exemple, de cette théière aux formes vieilles de 2000
ans que Yin Xin a achetée à Pékin, et dont il avoue
en riant qu’elle est sûrement artificiellement patinée…
« Métamorphoses » qu’il montrera au Shanghai Art
Museum à la fin de l’année, dans ce pays où il
se sent désormais aussi étranger qu’à Paris.
Irrémédiablement métissé. Comme toutes les beautés
aujourd’hui.
Contact: paris@yinxin.org
Portrait
Par Denyse Beaulieu / photos : Catherine Thiry
Et paradoxal
parcours, pour un gamin né au Turkestan où la Grande Marche
avait semé ses parents, qui dès l’âge de onze
ans, s’exerçait au pinceau sur des tableaux de propagande
politique. |
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