Bonjour, vous n’êtes pas claustrophobe? nous lance le guide avant de nous faire signer une décharge. La visite se fait seul. Disons plutôt avec son moi. Soi et ses angoisses.
Gregor Schneider, artiste qui a reçu en 2001 le Lion d’Or à la Biennale de Venise pour sa Maison Morte, s’approprie l’espace de la Maison Rouge pour en faire un labyrinthe des sens, et propose une expérience rare.
Une porte d’entrée et une porte de sortie. Et que de choses entre les deux. Trop en dire serait affaiblir l’oeuvre, qui se vit avec une vigilance maximale, des sens développés à l’extrême. Perceptions de la vue, du toucher, de l’ouïe, du nez qui nous poussent à modifier nos rapports à l’espace et au temps, images mentales et surtout notre comportement.
Une passionnante réflexion sur l’architecture, les lieux, les espaces d’expositions, les peurs, et surtout le rapport à l’oeuvre, à expérimenter car comme le dit l’artiste, « je considère que l’action est supérieure à la pensée. » Une torture blanche surprenant à endurer absolument – à condition de ne pas être cardiaque.
A peine remis de ce choc c’est vers un autre type de bouleversement que le visiteur est invité à se diriger.
Native de Séville, l’artiste contemporaine Pilar Albarracin s’attache à explorer les images, symboles et topoi de la – trop stigmatisée – culture andalouse. La Maison Rouge propose pour la première fois en France une exposition mêlant installations et performances filmées.
La brune aux regard intense et lèvres rouges se met en scène elle-même, préparant une « omelette à l’espagnole » en y remplaçant les pommes de terre par des morceaux de sa robe dépecée de manière sado-masochiste, criant à la mort et à l’amour sur air de guitare, ou encore gisant dans une flaque noire et se débattant avec une outre dont le liquide l’ensanglante peu à peu.
Faisant référence à une tradition religieuse, l’artiste nous laisse voir les dessous et jupons d’un millier de robes flamenco pendues en un « Toit d’offrandes » multicolore, perdant toute valeur folklorique.
Situation de la femme en Espagne et régime franquiste sont autant de problématiques que l’ensemble extrêmement cohérent de son oeuvre soulèvent. Avec violence.
cdm
photos : Marc Domage, Détails de l’installations Gregor Schneider, Techno de ofrendas, 2004-2008, détail de l’installation
Gregor Schneider, Süßer Duft Pilar Albarracin, Mortal Cadencia, jusqu’au 18 Mai 2008 à la Maison Rouge 10, bd de la Bastille Paris 12ème